Ghorfas, ksars, habitats troglodytiques et villages perchés du sud tunisien

Nous partons à l’assaut du sud avec notre petite voiture de location. Nous n’avons cependant plus de dinars tunisiens et la banque de Tozeur ne veut ni prendre des cartes de crédit, ni nos schillings autrichiens. On ne nous prédit rien de bon non plus en matière de banques dans la région de Kebili. Nous entreprenons donc le grand détour par Gafsa, même si cela nous fait monter vers le nord. Après le plein en monnaie locale et en carburant, nous nous rabattons vers le sud-est et Gabès. Puis vers le sud et Médenine où nous avons notre premier site à visiter après 300 kilomètres de route. La Tunisie veut bien être le plus petit pays du Maghreb, il y a quand même des distances à franchir.

Médenine

La ville relativement grande tient en son milieu une place de marché entouré de ghorfas. Cet alignement d’entrepôts à greniers du temps des nomades ressemblent à des habitations de lutins. Ces ghorfas forment toujours une cour et ont les ouvertures à l’intérieur afin de pouvoir être défendus. On y entrepose toujours des marchandises, même si les accès par les escaliers étroits sont difficiles.

Ghorfas de Medenine. Photo © André M. Winter

Ghorfas de Medenine. Photo © André M. Winter

Les ghorfas du Ksar Jouamaâ

Le Ksar Joumaa est un amas de ghorfas en haut d’une colline loin de toute civilisation actuelle et donc en ruine. Le site se trouve sur la route entre Médenine et Beni Khedache. Les coordonnées géographiques du ksar sont 33.250886, 10.257974.

Ghorfas en ruines de Ksar Joumaa. Photo © André M. Winter

Ghorfas en ruines de Ksar Joumaa. Photo © André M. Winter

Un ksar (صر qaṣr ) est un village fortifié d’architecture berbère que l’on trouve en Afrique du Nord. Combinant généralement des greniers et des habitations, on les trouve communément sur des contreforts proches d’oasis afin de se protéger d’attaques venant de tribus nomades. Un ksar est composé de cellules, appelées ghorfas (chambres en arabe), qui servent à stocker les denrées en prévision de plusieurs années successives de sécheresse. Le mot ksar est emprunté à l’arabe qasr (château, village fortifié), qui vient lui-même du latin castrum (fort ou place forte). Il a donné le mot alcázar en espagnol. En berbère, le mot équivalent est ighrem. Source: Wikipédia

Une ghorfa est une sorte de grenier servant à emmagasiner des denrées: des céréales dans la partie basse, des olives et des fromages dans la partie haute. L’aération est assurée par deux trous dans les murs extérieur et intérieur créant un courant d’air. Ces cellules voûtées ont la forme d’un demi-cylindre clos du côté extérieur du ksar et muni d’une porte ouvrant sur la cour. Chaque ksar peut comporter de un à six étages comptant des centaines de ghorfas (en moyenne 200). À moins d’appartenir à une même tribu, deux ghorfas voisines ne communiquent pas et l’espace parfois aménagé entre elles permet de dissimuler les produits de valeur. Source Wikipédia

Cour du Ksar Joumaa. Photo © Leonhard Schwarz

Cour du Ksar Joumaa. Photo © Leonhard Schwarz

Trois étages de ghorfas du Ksar Joumaa. Photo © André M. Winter

Trois étages de ghorfas du Ksar Joumaa. Photo © André M. Winter

La route C207 entre Bou Abid et Ksar Hadada

Cette route non-goudronnée de 20 kilomètres est un certain risque. D’une part, notre 205 de location a une rotule de direction plus que défectueuse à droite, d’autre part la route n’est pas toujours de la qualité sur la photo. Elle passe presque constamment sur du gros gravier et parfois de la roche dure. Pourtant c’est à cet endroit que le carter vient de taper contre  une pierre. Nous voyons bien l’enfoncement dans la tôle, mais par chance pas d’huile qui coule et on n’entend pas d’autres bruits bizarres que ceux que la vieille 205 émet depuis le début.

Notre 205 sur la route C207 entre Bou Abid et Ksar Hadada. Photo © André M. Winter

Notre 205 sur la route C207 entre Bou Abid et Ksar Hadada. Photo © André M. Winter

Ksar Hadada

C’est un grand village dont les ghorfas ont été restaurés afin d’en faire un hôtel. À notre passage, Ksar Hadada (قصر حدادة) n’est cependant pas ouvert et nous doutons qu’il l’ait été avant.

Le climat est semi-aride dans cette région, le Sahara se trouve à une vingtaine de kilomètres et la pluie y est très rare mais très forte lorsqu’elle fait son apparition. Les températures peuvent atteindre 50°C durant la journée en été et descendre à 0°C durant la nuit en hiver. Ksar Haddada porte ce nom car son fondateur se nommait Brahim el Haddad (haddad signifie forgeron). Selon les anciens du village, il était originaire de l’actuelle Libye. Une partie du ksar a été utilisée par le réalisateur George Lucas dans le film Star Wars, épisode I: La Menace fantôme, pour créer le village de Mos Espa, sur la planète Tatooine, où est né Anakin Skywalker. Source: Wikipédia

Ksar Hadada. Photo © André M. Winter

Ksar Hadada. Photo © André M. Winter

Ksar Hadada. Photo © Leonhard Schwarz

Ksar Hadada. Photo © Leonhard Schwarz

La ruine habitée du village de Chenini

Le village en partie troglodytique  est décrit dans les guides touristiques comme pittoresque, aussi se trouve-t-il sur le circuit touristique des ksour sud de la Tunisie. Chenini est également le nom de l’une des lunes de la planète de Luke Skywalker dans Star Wars dont de nombreuses scènes sont tournées dans la région. Pourtant c’est une grande ruine désolante car ce tas de pierres disloquées est encore habité par des berbères réduits à envoyer leurs enfants mendier auprès des rares visiteurs se perdant ici hors saison. C’est un lieu démontrant bien l’inaction de l’état tunisien (le dictateur Ben Ali est aux commandes depuis plus de dix ans) et de la gestion inégale des revenus touristiques du pays. Nous regrettons d’être venus, nous ne nous sentons pas à l’aise.

Ksar de Chenini. Photo © André M. Winter

Ksar de Chenini. Photo © André M. Winter

Chenini (شنني) est surplombé par un ksar citadelle, ou kalâa, juché sur une butte à environ 500 mètres d’altitude. Il s’agit d’un lieu de stockage des réserves alimentaires et des biens de valeur qui servait également de refuge en cas d’attaque. Il a permis aux Berbères de se maintenir, tout en établissant des relations de clientèle et de protection avec les tribus arabes arrivées notamment lors des invasions hilaliennes au 11e siècle. Lorsque le risque d’invasion ou de pillage est devenu moins important et avec la sédentarisation des berbères, le village a commencé à se développer sur les flancs de la butte et vers le bas jusqu’à la création du nouveau village de Chenini vers 1960 deux kilomètres plus bas. Source: Wikipédia

Crête du ksar de Chenini. Photo © André M. Winter

Crête du ksar de Chenini. Photo © André M. Winter

La mosquée toute blanche est située sur un col entre le ksar et la montagne au sud-est. Il parait que c’est la seule mosquée de Tunisie qu’on peut visiter en tant que non-musulman croyant. Sans doute moyennant quelques dinars. Nous n’avons pas essayé.

Mosquée blanche de Chenini. Photo © André M. Winter

Mosquée blanche de Chenini. Photo © André M. Winter

Mosquée de Chenini. Photo © André M. Winter

Mosquée de Chenini. Photo © André M. Winter

Les pierres ne sont ni taillées, ni maintenues par du mortier. Il s’agit de constructions en pierres assez brutes et d’argile parfois pisé. Pour construire en hauteur, il faut solidifier les murs par des arcs qui sont eux-mêmes peu stables.

Ruines du ksar de Chenini. Photo © André M. Winter

Ruines du ksar de Chenini. Photo © André M. Winter

Il est difficile de dire quelle est vraiment la partie portante de cet escalier.

Escalier surchargé dans une maison abandonnée de Chenini. Photo © André M. Winter

Escalier surchargé dans une maison abandonnée de Chenini. Photo © André M. Winter

Ces filles viennent vers nous alors que nous sommes sur le point de repartir. La photo est prise de la voiture de location. Elles parlent un charabia franco-berbère-anglais dont nous distinguons les mots « photo » et « dinar ». Nous tentons d’engager une conversation, mais uniquement le mot « dinar » revient et elles savent très bien que la photo a été prise. Nous avons des appareils photographique reflex d’une taille qui ne se dissimule pas vraiment. Elles sont hargneuses et obstinées et en même temps curieuses, sympathiques et simplement enfants. Voyageant en avion et normalement en bus public, nous avons décidé de ne pas prendre avec des « cadeaux », nous n’avons don rien à leur offrir, même pas des fruits ou du pain, choses que nous préférons donner à la place d’argent à tout mendiant. Elles ont donc gain de cause pour finir.

Filles voulant se faire payer pour être prises en photo à Chenini. Leonhard Schwarz

Filles voulant se faire payer pour être prises en photo à Chenini. Leonhard Schwarz

Mesa érodée près de Chenini . Photo © André M. Winter

Mesa érodée près de Chenini . Photo © André M. Winter

Nous voulons rester dans la région mais ne trouvons pas de logement ailleurs qu’à Gabès. La carte en bas montre notre tour de 550 kilomètres entre Tozeur à gauche, Gabès au bord de la mer, Médenine, Tataouine et Chenini au sud.

Les habitations troglodytiques de Matmata

Aujourd’hui la plupart de ces caves sont à l’abandon mais certains servent toujours d’étable et en 1996 nous en avons vu une de ces grottes artificielles habité par une vieille femme.

Habitation troglodytique à étages murés à Matmata. Photo © André M. Winter

Habitation troglodytique à étages murés à Matmata. Photo © André M. Winter

Descente dans une habitation troglodytique de Matmata. Photo © André M. Winter

Descente dans une habitation troglodytique de Matmata. Photo © André M. Winter

Ce sont des habitations creusées à même le sol. Autour d’un vaste puits habituellement circulaire constituant la cour de l’habitation sont creusées longitudinalement et en étages les pièces qui serviront pour l’étage inférieur de chambres (camour), de cuisine (matbakh), de bergerie pour les chèvres et d’étables, l’étage supérieur étant réservé pour le stockage (makhzen) des céréales, dattes, olives et figues séchées. Dans cette région soumise à de très fortes canicules, plusieurs mois par an, cet aménagement particulier de l’habitat permet de faire pénétrer la lumière dans les pièces souterraines tout en y maintenant de la fraîcheur au plus chaud de l’été. Bien que la température intérieure de ces habitations ne soit pas constante durant toute l’année, comme dans une grotte, les amplitudes thermiques entre l’hiver et l’été y sont assez réduites: une quinzaine de degrés en janvier et 23 à 25 degrés en juillet. Depuis le niveau naturel du sol extérieur, on descend généralement dans la cour directement au moyen d’un étroit escalier aménagé à flanc de paroi ou éventuellement d’une échelle appuyée contre cette dernière. On peut aussi pénétrer dans la cour par un couloir souterrain horizontal. Certaines maisons sont assez élaborées avec une succession de cours intérieures auxquelles on accède par des couloirs souterrains partant des logis ou de la cour principale, deux niveaux de pièces superposées, tunnel d’accès en pente douce s’amorçant à partir du rebord supérieur du puits, etc. Ce type de construction existait déjà il y a 3000 ans: les Phéniciens, qui débarquent vers 1200 avant notre ère l’adoptent et les Romains reprennent à leur tour cette conception pour construire des appartements d’été dans leurs villes. Source: Wikipédia

Cave et étable troglodytique à Matmata . Photo © André M. Winter

Cave et étable troglodytique à Matmata . Photo © André M. Winter

Dromadaire blanc dans une étable troglodytique à Matmata . Photo © André M. Winter

Dromadaire blanc dans une étable troglodytique à Matmata . Photo © André M. Winter

Les garçons qui nous servent de guides nous racontent toutes sortes de choses et nous mènent dans plusieurs de ces caves, mais finalement nous nous rendons compte qu’ils ne parlent pas français, du moins ils ne le comprennent pas, ils ne répètent que des fragments de phrases appris par cœur. Apprennent-ils aussi le Coran ainsi?

Nos garçons guides dans une habitation troglodytique à étages à Matmata. Photo © André M. Winter

Nos garçons guides dans une habitation troglodytique à étages à Matmata. Photo © André M. Winter

Le chameau domestique et le dromadaire appartiennent au même genre biologique. Certains les considèrent plus comme deux variétés régionales plutôt que comme deux espèces. Le fœtus du dromadaire développe deux bosses pendant la gestation qui se fondent en une seule peu avant la naissance. Les deux espèces peuvent s’hybrider, le petit étant le turkoman, qui présente une bosse légèrement subdivisée. Source: Wikipédia

Chameau d'Arabie à Matmata. Photo © André M. Winter

Chameau d’Arabie à Matmata. Photo © André M. Winter

Tamezret

Le village de Tamezret. Photo © Leonhard Schwarz

Le village de Tamezret. Photo © Leonhard Schwarz

Village à l’est de Matmata avec une route en revêtement pierreux menant à Kebili. Après notre expérience entre Bou Abid et Ksar Hadada vers midi de cette journée, nous préférons faire le détour par Gabès pour retourner sur le Chott el-Djerid. Nous nous arrêtons à d’autres sites de tournage de Star Wars. Durant ce long retour, André est pris d’une tourista purgative. Apparemment l’eau que nous buvons des robinets n’est pas des meilleures.

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