La Grotte Franchthi

Il a déjà fait très chaud pour rejoindre la deuxième doline de Didima, mais nous enchainons encore une autre petite randonnée vers la Σπήλαιον Φράγχθι (Grotte Franchthi). C’est une grotte avec deux ouvertures avec des traces d’habitations. Le chemin à pied le plus court part de la Παραλία Λαμπαγιαννά (Plage de Lampagianna) au nord de la côte rocheuse au nord de Κοιλάδα (Kiláda). Le sentier est bien indiqué et présente peu de dénivelé, il est balisé en rouge. Au début, on peut marcher au bord de l’eau sur les rochers, mais le chemin officiel est un peu plus haut. On est en bord de mer et la brise rafraîchit un peu l’air chaud de l’après-midi.

On a constamment l’île Κορωνίδα Αργολίδας (Koronida Argolida) en vue, elle est la propriété des descendants de l’armateur Σταύρος Λιβανός (Stavros George Livanos) et on n’y voit qu’un port avec un grand yacht.

Ile de Koronída. Photo © Alex Medwedeff

Ile de Koronída. Photo © Alex Medwedeff

Plus tard c’est le village de Κοιλάδα (Kiláda) que l’on voit au loin dans le golfe Argolique.

Golfe de Kiláda. Photo © André M. Winter

Golfe de Kiláda. Photo © André M. Winter

Village de Kiláda. Photo © André M. Winter

Village de Kiláda. Photo © André M. Winter

Le l’habitation submergé de Paralia

Peu avant la grotte, on remarque des comme des prélèvement de terre à côté du chemin et aussi des structures rectangulaires dans la mer près du rivage. Il s’agit de vestiges en relation avec la Grotte Franchthi

La colonie néolithique d’origine s’est étendue hors de la grotte et le long du littoral, appelée la Paralia. Il a été occupé en grande partie au Néolithique (- 9000 à -5000), parallèlement à la grotte elle-même. L’établissement aurait à l’origine couvert quelques hectares et était situé en bordure d’une large plaine côtière. Vers la fin du Néolithique, lorsque le niveau de la mer atteignait celui d’aujourd’hui, la plaine est inondée et la majeure partie de la Paralia submergée.

La colonie se composait d’une communauté néolithique active et autosuffisante d’agriculteurs, d’éleveurs et de pêcheurs. Leurs maisons avaient des fondations en pierre, des sols en argile et des murs en plâtre pour l’isolation et l’hygiène. Leurs pots étaient en argile, certains décorés de manière complexe, tandis que les outils tranchants étaient en silex et en obsidienne. D’autres types d’outils, y compris des haches, des ciseaux et des meules, étaient faits de roche dure comme la serpentinite. Les bijoux étaient fabriqués à partir d’objets naturels simples tels que des coquillages marins. Selon les fouilleurs, un atelier destiné à la production de bijoux en coquillages marins a été identifié à Paralia.

Golfe de Kiláda et la Plage de Paralia. Photo © Alex Medwedeff

Golfe de Kiláda et la Plage de Paralia. Photo © Alex Medwedeff

Certaines parties de la colonie ont été utilisées pour l’enterrement des morts, bien qu’il ne soit pas clair si cela a eu lieu au plus fort de l’occupation ou en période d’abandon.

Franchthi faisait partie d’un vaste réseau de sites néolithiques au sein de l’Argolide et au-delà, dans lequel circulaient des personnes, des idées et des objets. Cela incluait  l’obsidienne de l’île de Melos, la roche dure pour les outils de meulage du golfe Salonique et l’argile pour les pots de Corinthe et d’ailleurs.

L’accès nord à la Grotte Franchthi

En un quart d’heure on est à l’entrée de la grotte. Elle est grillagée, mais le portail est ouvert lors de notre passage mai 2022. Autrement il faut appeler à la commune de Ερμιονίδα (Ermionida) sous 27543-60028 ou 27543-60029. Un chemin aménagé permet d’explorer la grotte sans abimer les structures. Dans la partie nord a été installé une étable du Néolithique. Des panneaux en grec et en anglais expliquent assez bien les informations disponibles sur la grotte.

Grotte Franchthi et la Plage de Paralia. Photo © Alex Medwedeff

Grotte Franchthi et la Plage de Paralia. Photo © Alex Medwedeff

Le panneau de gauche se trouve au début du chemin, celui de droite, uniquement en grec près de la grotte. Ce dernier souligne le financement de la rénovation de la grotte par le programme de l’union Européenne ΕΣΠΑ 2007 – 2013 (National Strategic Reference Framework, NSRF).

La grotte mesure environ 150 mètres de long et environ 45 mètres de large, avec une orientation nord-ouest/sud-est. Deux grandes ouvertures se sont formés quand ces parties de la grotte se sont effondrés laissant des larges talus de d’éboulis. Ces effondrements semblent remonter à la fin du Néolithique (-5000).

Dans la Grotte Franchthi. Photo © Alex Medwedeff

Dans la Grotte Franchthi. Photo © Alex Medwedeff

L’emplacement des accès et l’étendue actuelle des installations de la grotte ne sont pas les mêmes que lors de son occupation préhistorique. Le plus loin nous remontons dans le temps, plus le sol est bas et plus la grotte est vaste. Au fil du temps, divers matériaux se sont déposés sur le sol de la grotte, entraînant son élévation progressive. Certaines d’entre elles étaient d’origine naturelle, telles que des roches tombant du plafond, des poussières emportées par le vent ou de l’argile transportée par l’eau. Ceux-ci ont contribué à la formation de couches géologiques. De plus, des matériaux archéologiques tels que des restes de viandes, des outils, des cendres de foyers, des débris de construction et des déchets ont été retrouvés dans les couches.

Des fouilles ont été menées à l’intérieur et à l’extérieur de la grotte entre 1967 et 1979 sous la direction de l’Université d’Indiana et de l’American School of Classical Studies à Athènes. Utilisant des techniques de fouilles pionnières et une approche multidisciplinaire, les fouilles ont identifié des preuves importantes du Paléolithique et du Mésolithique, des périodes jusque-là peu documentées en Grèce. Ils mettent en lumière le passage des sociétés de cueillette aux sociétés d’agriculteurs, à la navigation dans la mer Égée, aux pratiques mortuaires dans le Mésolithique et le Néolithique, ainsi qu’à la fabrication de poteries. C’est un exemple rare d’installation avec une période d’occupation aussi longue, et également un des sites les mieux connus de l’âge de pierre en Europe méridionale.

Afin d’étudier l’évolution de la grotte et notamment l’histoire de son utilisation par l’homme, les archéologues ont creusé de profondes tranchées verticales. De cette façon, les couches mentionnées ci-dessus apparaissent en section et peuvent être interprétés dans l’ordre chronologique, de la plus ancienne en bas, à la plus jeune en haut. La tranchée encore visible atteint près de 10 mètres, révélant une succession de couches du Paléolithique supérieur à la fin du Néolithique.

Depuis la fin des fouilles, la plupart des tranchées se sont effondrées. Au cours de récents travaux de développement la plupart des tranchées ont été comblées, à l’exception d’une laissé pour le public.

Ces tranchées de fouille, atteignaient des profondeurs d’une dizaine de mètres et  ont donné une succession de couches s’étendant du Paléolithique supérieur jusqu’à la fin du Néolithique (-40000 à -5000). Cela atteste la vie dans la grotte, notamment au Mésolithique et au Néolithique. Durant cette dernière période, des parties de l’espace intérieur étaient organisées avec des dallages en pierre, des foyers et d’autres constructions en argile. De plus, les habitants de la grotte utilisaient des pots en argile, des outils en pierre et en os, ainsi que des objets à caractère symbolique, dont des bijoux et des petites figurines en divers matériaux. En dehors d’un quartier résidentiel, la grotte, à partir du Mésolithique, a souvent été utilisée pour les sépultures.

Il y a environ 40000 ans, une énorme éruption volcanique s’est produite dans les Champs Phlégréens près de Naples en Italie, avec des cendres réparties sur une grande partie de l’Europe et de la Méditerranée orientale. À Franchthi, cela a formé une couche épaisse qui se trouve maintenant à environ 10 mètres sous la surface actuelle du sol. La datation précise des particules de tephra dans la cendre indique une occupation humaine précoce de la grotte avant l’éruption, probablement au Paléolithique moyen. Des téphras volcaniques de la même origine ont été détectés sur d’autres sites grecs, y compris à proximité de la Grotte de Klissoura dans la région de l’Argolide.

Un squelette humain a été découvert à environ 7,5 m sous la surface actuelle du sol. Les fouilles ont révélé une sépulture humaines mésolithiques des mieux conservées en Grèce. Daté d’environ 10500 ans, le squelette était celui d’un homme d’environ 25 ans, qui avait reçu des coups mortels à la tête. Il a été enterré dans une fosse peu profonde sans aucune offrande, dans une position contractée avec les bras croisés sur sa poitrine. Des pierres couvraient à la fois son thorax et son bassin.

La grotte comme étable

Depuis le Néolithique, des grottes facilement accessibles ont été utilisées, plus ou moins systématiquement, pour abriter des troupeaux d’ovins et de caprins. Franchthi est un cas classique d’une telle grotte. Au moins au cours du 20e siècle, période pour laquelle des informations précises sont disponibles, et jusqu’aux premières années des fouilles, elle était utilisé par la même famille comme enclos saisonnier. La famille était basée dans le village voisin de Fournoi et ses revenus étaient principalement générés par l’élevage de grands troupeaux de moutons et de chèvres. Ils produisaient et vendaient principalement de la viande, mais aussi à une époque antérieure, des quantités importantes de fromage et de la laine. Durant la période de prospérité des années 1940 et 1950, le troupeau comptait plusieurs centaines de bêtes et était composé essentiellement de chèvres et de quelques moutons. Les animaux étaient hébergés dans la grotte d’octobre à mai.

Étable reconstitué dans la Grotte Franchthi. Photo © André M. Winter

Étable reconstitué dans la Grotte Franchthi. Photo © André M. Winter

Vers l’arrière de la grotte derrière le tas central de roche, se trouve un petit bassin d’eau saumâtre en hiver. Jusqu’au Néolithique, alors que le niveau de la mer était plus bas qu’aujourd’hui, cette zone était une cavité sèche ajoutant de l’espace utilisable.

L’organisation interne de la grotte était orientée vers la protection du troupeau et la résidence temporaire de 2 à 3 personnes, bêtes de somme, chevaux ou mules, et chiens. Chèvres et moutons étaient gardés séparément. L’enclos des animaux et d’autres structures ont été construits avec des pierres de la grotte, ainsi que des branches pour les murs et les portes, et un recouvrement de broussailles épineuses pour dissuader les animaux de sauter par-dessus l’enclos. Le matériau en bois provenait de buissons disponibles localement. L’utilisation à long terme de la grotte comme enclos a conduit à l’accumulation d’une épaisse couche de fumier, dont des fragments sont conservés à l’intérieur de la partie restaurée de l’enclos, ainsi qu’à l’extrémité sud-ouest de la grotte. Le fumier était vendu comme engrais de première qualité, tandis que de petites quantités étaient utilisées à l’intérieur de la grotte pour isoler le sol de l’humidité. Lors des travaux d’aménagement, la partie conservée de l’enclos a été restaurée et partiellement reconstruite.

Baie de Lampagianna. Photo © Alex Medwedeff

Baie de Lampagianna. Photo © Alex Medwedeff

Pause à la Chapelle Agios Ioannis

Sur la Παραλία Λαμπαγιαννά (Plage de Lampagianna) il n’y a presque pas d’ombre, mais nous voyons une chapelle sur le petit cap au nord. L’Εκκλησία Άγιος Ιωάννης (Église Agios Ioannis) est entourée d’arbres et nous trouvons même de l’ombre pour notre Trafic. Nous prenons place sur les bancs à l’ombre près de la chapelle, non sans emporter le réchaud pour le café et des petits gâteaux.

Nef de la Chapelle Agios Ioannis. Photo © André M. Winter

Nef de la Chapelle Agios Ioannis. Photo © André M. Winter

On ne reste cependant pas seuls ici et les passages sont à la fois typiques et originaux. C’est d’abord un grec qui passe en vieux 4×4 en faisant le tour de la chapelle sans nous regarder et sans s’arrêter. Puis ce sont des jeunes touristes allemands en voiture le location qui semblaient avoir eu la même idée que nous sauf qu’il n’y plus de place à l’ombre pour leur voiture et les bancs restants sont tournés vers la chapelle et non vers la mer. Ils observent jalousement notre cafetière italienne, mais n’osent pas demander que l’on leur fasse un café. Le troisième est un cinéaste grec filmant des plans fixes de la chapelle, de l’île Κορωνίδα Αργολίδας (Koronida Argolida) et de la côte sans trépied (!). Chose désagréable: il laisse tourner son moteur et sa clim durant le quart d’heure de sa présence.

Nous cherchons ensuite un emplacement pour la nuit.

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