Le Nécromantéion de l’Achéron

C’est notre dernier jour en Grèce, ce soir, nous rembarquons vers l’Italie. Nous devons être à 19h30 au port d’Igoumentitsa pour le départ à 21h30. Cela laisse encore du temps pour quelques visites le 28 mai 2022. Ces endroits n’étaient pas prévu sur notre itinéraire, car notre port de départ du ferry pour rentrer a été changé de Patras à Igoumentisa.

Le premier arrêt est pour le petit village au grand nom de Mesopotamo. On y trouve le site archéologique du Νεκρομαντείο Αχέροντα (Mur cyclopéen de l’Achéron), un lieu de présages comme Delphes, mais axée sur la communication avec ses aïeux. Avec un labyrinthe, des planchers mobiles et beaucoup de substances psychoactives, on étourdissait ceux qui voulait parler aux morts, l’arnaque trouvait son point ultime dans une cave de tuf très sombre. Le site est beaucoup plus petit que celui de Delphes bien qu’il y ait une aire archéologique additionnelle libre d’accès au nord du site principal.

La halle souterraine du Nécromantéion de l'Achéron. Photo © André M. Winter

La halle souterraine du Nécromantéion de l’Achéron. Photo © André M. Winter

On ne peut pas accéder en voiture directement au site, il faut prendre le parking indiqué sous le petit centre-ville. Cela déleste positivement le centre et l’accès aux fouilles. L’entrée est de EUR6 par personne. Bien que nous ne sommes nullement pressés, nous sommes encore une fois les premiers aux caisses et sur le site. Mais un bus de retraités et un autre d’écoliers nous suit de près.

Les sources anciennes faisant référence au temple d’Hadès et de Perséphone sont nombreuses et parfois déroutantes, mais la plupart préconisent son placement sur une colline de la vallée de l’Achéron. Dans les temps anciens, le lac Acherousia s’est formé au point de confluence de l’Achéron et de ses affluents Kokytos (rivière Mavros moderne, c’est-à-dire Rivière Noire) et Pyriflegethon (rivière Vouvos), dans une zone plate au sud-est de la colline du Nécromantéion . De là, la rivière suivait un cours semblable à son actuel, à la baie d’Ammoudia pour se jeter dans la mer Ionienne.

Les fouilles sur la colline ont été menées par la Société archéologique d’Athènes et l’Université d’Ioannina en deux périodes dans les années 1960 et 1970. On s’est basé sur des sources anciennes (Hérodote, Thucydide, Lucien, etc.) et surtout sur la description d’Homère (l’Odyssée), afin d’identifier le complexe dans sa phase hellénistique du 3e et du 2e s siècle avant notre ère. Le temple a été incendié par les Romains en -167, puis progressivement abandonné.

Pendant l’occupation ottomane au début du 18e siècle, les vestiges de la colline sont comblées, couvertes de terre et complètement invisibles. La chapelle, le monastère et un cimetière sont érigés sur le sommet. A la même époque, près de l’entrée de la partie orientale de l’ancien temple, une maison forte à deux étages de type Koulia est érigée par les Ottomans.

Porte post-byzantine et reste fort turc dans le Nécromantéion de l'Achéron. Photo © Alex Medwedeff

Porte post-byzantine et reste fort turc dans le Nécromantéion de l’Achéron. Photo © Alex Medwedeff

Porte post-byzantine dans le Nécromantéion de l'Achéron. Photo © André M. Winter

Porte post-byzantine dans le Nécromantéion de l’Achéron. Photo © André M. Winter

Ruine d'une maison hellénistique dans le Nécromantéion de l'Achéron. Photo © André M. Winter

Ruine d’une maison hellénistique dans le Nécromantéion de l’Achéron. Photo © André M. Winter

Chapelle Agios Ioannis Prodromos sur un mur cyclopéen dans le Nécromantéion de l'Achéron. Photo © André M. Winter

Chapelle Agios Ioannis Prodromos sur un mur cyclopéen dans le Nécromantéion de l’Achéron. Photo © André M. Winter

L’emplacement du Nécromantéion sur une colline au confluent de la rivière Achéron avec ses affluents est associé aux Enfers. Les gouffres de la terre, les grottes et les canyons étaient identifiés aux entrées des Enfers, tandis que les lacs et les rivières entrant dans les Enfers et renouvelant leur cours souterrain étaient liés au chemin suivi par les âmes des morts vers l’Hadès. .

Les anciens Grecs considéraient les morts comme des ombres libérées du corps périssable, avec la capacité de prédire l’avenir. Parfois, cependant, ils étaient caractérisés par un manque de conscience et de vengeance envers les vivants, de sorte que le contact avec eux n’était pas considérés aisé. L’ancienne tradition voulait que les visiteurs puissent entrer en contact avec l’âme d’un être cher. La partie orientale du complexe était le centre du rituel du Nécromantéion, selon des recherches archéologique et des textes anciens. Les « clients » sont entrés par l’entrée nord du complexe, et ils y sont restés quelque temps pour être soumis à une préparation mentale et physique. À l’est, des fêtes et des festins avaient lieu, tandis que dans le passage sud, également connu sous le nom de « Labyrinthe » des offrandes de céréales étaient placées. Par un passage voûté, les maitres de l’oracle pénétraient dans la salle centrale du sanctuaire, où l’on pense que la communication avec les morts avait lieu.

Mur cyclopéen dans le Nécromantéion de l'Achéron. Photo © André M. Winter

Mur cyclopéen dans le Nécromantéion de l’Achéron. Photo © André M. Winter

Halle d'offrandes dans le Nécromantéion de l'Achéron. Photo © André M. Winter

Halle d’offrandes dans le Nécromantéion de l’Achéron. Photo © André M. Winter

Pithos dans une halle d'offrandes du Nécromantéion de l'Achéron. Photo © André M. Winter

Pithos dans une halle d’offrandes du Nécromantéion de l’Achéron. Photo © André M. Winter

Le complexe hellénistique du Nekromanteion aujourd’hui visitable couvre une superficie de trois acres. Il est entouré d’une enceinte rectangulaire de 62,40 x 46,30 m, conservée sur une grande hauteur. Sa construction avec des blocs de calcaire local suit le système polygonal. Dans l’enceinte se trouve le complexe du temple, qui est subdivisé en une partie est et une partie ouest. La partie orientale la plus ancienne, construite pendant la période de la Coalition de l’Épire (-330 à -233). comprend le bâtiment principal du temple et les couloirs périmétriques sur ses côtés nord, est et sud. La partie occidentale, construite pendant les années de la Ligue épirote, était destinée à répondre aux besoins d’hébergement des fidèles et des prêtres et n’était pas associée aux rituels. Il se compose de la cour et de pièces rectangulaires et carrées.

Sur le plan en bas sont en bleu les éléments préhistoriques, en ocre les éléments de la période hellénistique, en rouge les parties post-byzantines et en rose les constructions ottomanes.

Plan du sanctuaire du Nécromantéion de l'Achéron. Photo © André M. Winter

Plan du sanctuaire du Nécromantéion de l’Achéron. Photo © André M. Winter

Le sanctuaire principal est carré et mesure 21,3 x 21,6 m. Il a été construit selon le système polygonal, avec des murs extérieurs particulièrement solides, de 3,3 m d’épaisseur, qui sont conservés sur une hauteur de plus de 4 m. Il comportait probablement un premier étage en briques. Il est divisé en trois salles rectangulaires parallèles. La salle centrale, mesurant 15 x 4,25 m, au sol dallé en pierre, est le lieu où se déroulaient les rituels. Les deux salles de part et d’autre du hall central sont tripartites, formant au total six salles carrées. Celles-ci contenaient un grand nombre de jarres, qui contenaient des céréales carbonisées telles que du blé, de l’orge, des fèves, etc. ainsi que des raisins, et ont donc été identifiées avec la zone de stockage du sanctuaire.

Sous le hall principal se trouve une salle souterraine de plan et de dimensions identiques. Quinze arches en calcaire reposant sur des piliers soutiennent le toit de la salle. La roche naturelle grossièrement taillée, portant des signes de forte érosion et de fissuration, forme le sol de la salle. Cette crypte souterraine ne comportait pas d’entrée dans l’Antiquité et était fermée et inaccessible. Son utilisation reste floue, mais elle est peut-être liée à une grotte qui était à l’origine utilisée pour le culte des dieux des enfers.

L’existence de l’Achéron Nekromanteion pendant les périodes archaïque et classique est tout à fait probable car documenté à la fois par la tradition littéraire et les découvertes archéologiques (par exemple dépôt de tessons de poterie et figurines de Perséphone) datant du 7e au 5e siècle avant notre ère. L’aplatissement de la crête de la colline pour la construction du complexe a probablement et lieu pendant la période de la Coalition de l’Épire. Cela a entraîné la destruction des vestiges des phases précédentes du sanctuaire.

Grand vase exposé dans le Nécromantéion de l'Achéron. Photo © André M. Winter

Grand vase exposé dans le Nécromantéion de l’Achéron. Photo © André M. Winter

En sortant, nous sommes quand même trempés de sueur, on se désaltère avec un capuccino glacé au premier café en descente, le Bar Πυλη (Pily). Il n’est pas majoritairement touristique car des grecs y sirotent divers types de cafés et d’ouzos.

Sur la terrasse du Bar Pily. Photo © André M. Winter

Sur la terrasse du Bar Pily. Photo © André M. Winter

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